Retourner aux épisodes de podcast

03 · Celle qui crée une série youtube · avec Chloé Dequeker


Tu penses que tu dois publier plus pour exister ? Et si la qualité, la rareté et des choix assumés valaient mieux que le bruit ?

Dans cet épisode, je reçois Chloé Dequeker, cofondatrice de la chaîne YouTube Superama (vulgarisation scientifique & effets spéciaux maison). Avec son binôme Alex, elle a fait de Superama un laboratoire d’expérimentation… et un studio de production au service d’institutions et de créateurs.

Ce que tu vas apprendre :

  • Comment passer d’un side-project YouTube à un modèle économique hybride viable ?
  • YouTube : monétisation, sponsors, influence… qu’est-ce qui paye vraiment (et quoi laisser de côté) ?
  • Qualité vs quantité : publier moins tout en construisant une communauté fidèle, c’est possible ?
  • Binôme créatif : comment se compléter (écriture/gestion vs réal/montage) sans s’épuiser ?
  • Protéger sa ligne éditoriale (humour, DA, ton) dans les contrats avec des institutions/marques ?
  • Association → entreprise : pourquoi changer de statut et ce que ça débloque concrètement.
  • Fake it until you make it” : provoquer sa chance et s’entourer pour monter ensemble.

À l’écoute, tu vas oser assumer ton positionnement, sécuriser tes deals, et dessiner un modèle qui te ressemble.

Liens utiles

Transcription

Manon
Aujourd’hui dans Celles qui créent, je donne la réplique à Chloé Dequeker,
cofondatrice de la chaîne YouTube Superama.

Chloé, c’est le genre de personne qui peut écrire une vidéo sur la mécanique quantique le matin et poser du placo l’après-midi. Elle dit qu’elle est un couteau suisse de la vidéo scientifique : écriture, production, recherche de financement, sous-titrage, stratégie de diffusion. Avec son binôme, elle a fait de cette chaîne un vrai laboratoire d’expérimentation, où chaque épisode est l’occasion de tester, apprendre et monter en compétences.

Dans l’épisode du jour, elle nous raconte les coulisses de Superama, comment ils bossent, créent, et comment ils arrivent à en vivre aujourd’hui. Un modèle hybride et inspirant qui pourrait bien te donner quelques idées.

Chloé
C’est une belle intro.

Manon
C’est une belle intro, c’est trop pompeux ou pas ? J’ai dit que vous en viviez.

Chloé
Ouais, bah plus ou moins. Indirectement.

Manon
Est-ce que tu peux nous présenter Superama, Chloé ?

Chloé
Oui, alors Superama, c’est d’abord une association, enfin plus pour très longtemps, mais c’est une asso qui crée de la vidéo. À la base pour YouTube, pour Alex et moi donc. C’est de la vidéo de vulgarisation scientifique. Au début on faisait de l’astronomie et puis après on s’est diversifié à plein de sujets scientifiques. Parce qu’on est curieux de plein de choses et puis qu’au bout d’un moment on a fait un peu le tour des sujets. Et aussi Superama, c’est de la prod plus globale audiovisuelle, donc on accompagne des gens qui savent pas produire, soit des youtubeurs, soit des institutions, des entreprises, des entrepreneurs, un peu moins des entrepreneurs, plutôt des institutions d’ailleurs, des universités qui ont besoin de mettre en valeur le travail de leurs chercheurs par exemple, et qui ont besoin d’une présence sur leurs réseaux sociaux ou les nôtres.

Manon
Donc Superama, c’est de la vidéo. C’est d’un côté, j’essaie de résumer, tu me dis si… Ouais, c’est un peu le bordel, mais on va le dire comme ça. Superama d’un côté, c’est un projet créatif, une chaîne YouTube que vous portez à deux en binôme où vous faites de la vulgarisation scientifique. Et en parallèle, c’est aussi un studio de production. C’est bien dit comme ça ? Un studio créatif où vous accompagnez du coup d’autres personnes, des institutions majoritairement à produire de la vidéo.

Chloé (02:14.125)
tout à fait.

Manon
Ok cool, donc vous êtes deux dans le projet ? C’est quoi la force de ça et c’est quoi les contraintes ?

Chloé
Alors on est deux à la base dans le projet, Alex et moi, mais on travaille de plus en plus avec d’autres créatifs, d’autres mondes de l’audiovisuel pour se raccompagner sur des postes sur lesquels on n’est pas spécialiste. Par exemple la musique, l’audio, ou sur l’écriture, sur certains sujets, ou parfois d’autres créateurs ou créatrices qui ont besoin d’une influence particulière sur les réseaux sociaux. Mais sinon à la base oui, on est qu’à deux.

Parce que le projet est né en 2020 ou en 2021, je sais plus, pendant le confinement. on s’est dit que ce serait cool avec Alex de créer des trucs sur Internet. On l’avait déjà un peu fait de notre côté, de manière pas du tout professionnelle et de manière totalement bancale. Et puis il se trouve que Superama, on s’est dit, allez, va faire comme si on était des pros dès le début et comme si on était ultra calé.

Et j’ai l’impression que s’être mise dans ce mood là, ça a marché. Et puis après on a eu beaucoup de chance parce qu’on a été propulsé par d’autres créateurs qui nous ont bien aimé, qui avaient beaucoup beaucoup d’abonnés et du coup ils ont mis en avant et ça nous a aidé à grimper assez vite.

Manon (03:37.548)
Donc du coup, quand vous avez commencé à deux, très rapidement vous êtes parti directement en mode, on va faire de la qualité, on va faire notre propre projet créatif. Est-ce que dès le début, il avait l’idée d’avoir le studio de création, le studio de production, ou à l’initiative, au démarrage, c’était purement le projet vidéo de la chaîne Superama qui fait de la vulgarisation ?

Chloé
Alors en fait c’était les deux à la fois parce que Alex il travaillait déjà avec une boîte de prods, il faisait de l’animation pour eux et du montage donc il avait déjà un pied là dedans, était déjà indépendant et moi je faisais de la communication et en le rencontrant j’ai eu tout de suite cette appétence pour l’audiovisuel et il m’a appris plein de trucs. Et moi c’est plutôt l’écriture, mon truc, l’organisation de projet ce genre de choses. J’ai aucune compétence technique en vidéo. Moi je dis bah faut faire ça, les gens y font. Du coup en l’occurrence Alex.

Manon
C’est ton taf ça en fait, dire  » il faut faire ça » – rires.

Chloé
Oui c’est ça. Et du coup c’est parti de là. Et aussi on s’est dit bah comme on n’a pas de réseau, on connaît personne, il faut qu’on produise des trucs pour montrer ce qu’on sait faire, comment on travaille. Donc la chaîne YouTube elle a aussi servi à ça. Mais on avait aussi envie de faire du pur YouTube mais sans partir dans le divertissement ou ce genre de choses parce qu’il y avait déjà beaucoup de contenu. Donc la vulgarisation scientifique.

Chloé (05:06.496)
D’autant que moi j’ai une formation de journaliste, donc croiser les sources, faire des recherches, ce genre de choses, j’avais déjà. trop bien.

Manon
Tu t’es appuyé sur des compétences que tu avais journalistiques pour venir nourrir votre projet créatif à deux. Et en même temps, en parallèle, il y avait toutes ces compétences que vous êtes allées chercher et apprendre fur et mesure que vous créez et que vous étiez dans le processus créatif.

Chloé
Oui, tout à fait. Et en plus, on s’est rendu compte qu’on se complétait vachement bien parce que moi j’avais tout l’aspect gestion de projet, écriture, etc. Et lui, il était plutôt en mode technique vidéo pure, réalisation, montage, motion design, genre de choses.

Et aussi, c’est tombé dans une période dont je disais avec le confinement, moi j’étais en CDI à l’époque et on m’a virée pour des raisons économiques et du coup j’ai eu le droit à un reclassement, enfin on m’a payé ma formation de ce que je voulais, on m’a donné des sous pour partir, donc j’en ai profité pour faire une formation aussi FAP de Montreuil en tant que chargée de production. Donc ça permet de savoir gérer un projet vidéo, le budgétiser, etc.

Manon
Trop bien. Donc tu as aller chercher les compétences finalement aussi pour venir…

Chloé (06:12.726)
Oui, parce que ça, ça me manquait toute la partie financière, organisationnelle d’un tournage. Comme je n’avais jamais foutu les pieds sur un tournage, il que j’apprenne à le faire. J’ai profité de tout cet argent qu’on me donnait et de tout ce temps qu’on m’a accordé. Et c’était trop cool, elle m’a beaucoup servi cette formation.

On le dira jamais assez, se former, profiter des outils, des organismes de formation, c’est important. Alors j’ai plein de questions à te poser qui se mélangent un peu. Mais du coup, comme tu as commencé à l’aborder, est-ce que tu peux me parler de ce pont qui se fait d’un côté entre Superama, votre projet créatif, donc d’une histoire d’un personnage qui raconte des choses, qui vulgarise des choses dans son petit vaisseau spatial, et en même temps votre clientèle.

Manon
C’est quoi le pont entre les deux ? Au début, tu as dit que ça nous a servi aussi à montrer des choses. Comment ça se passe aujourd’hui ? Est-ce que c’est toujours ça ? Est-ce c’est une vitrine pour vous ? Est-ce que vous devez démarcher vos clients ? C’est quoi un peu le fonctionnement aujourd’hui de ce lien entre Superama la chaîne et Superama, l’agence de prod ?

Chloé
Alors déjà, a tout de suite eu beaucoup de chance, c’est qu’on n’a jamais vraiment eu besoin d’aller chercher des clients. Ils sont très vite venus à nous. Comme je disais, on a eu la chance d’avoir une recommandation d’un vidéaste qui a beaucoup, beaucoup d’abonnés, ce qui nous a ramené beaucoup, beaucoup d’abonnés très vite, 20 000 en quelques jours. Donc c’est énorme pour une nouvelle chaîne. Et donc ça, ça nous a permis d’avoir une audience, de se développer.

Et de pouvoir ensuite rejoindre les milieux de créateurs de la vulgarisation et de se faire un réseau dans ce monde-là. Et petit à petit d’accéder à des contrats avec des institutions pour vulgariser leurs projets scientifiques, ce genre de choses. Donc aujourd’hui, nous, notre but, c’est de continuer à faire la chaîne YouTube, plus de l’influence pour les institutions via leurs projets de recherche ou des entreprises.

Manon (07:53.515)
D’accord

Chloé (08:14.426)
Je sais pas, une entreprise qui aurait besoin de mettre en avant un truc très technique sur sa façon de travailler, pourquoi pas, mais aussi produire d’autres vidéastes qui sont tout seuls, qui ne savent pas faire parce qu’ils leur manquent des compétences, parce qu’il y a un projet plus gros qui doit voir le jour, ils n’ont pas la structure pour accueillir le projet, ils leur manquent de la main d’oeuvre, ils ne peuvent pas gérer tout le montage, ce genre de choses.

Manon
Et venir leur apporter les compétences professionnelles d’un studio de production pour venir les aider dans leurs projets, leurs propres projets créatifs.

Chloé
C’est ça. Et du coup Superama, comme nous on montre qu’on sait faire de la vulga, on sait écrire, on sait faire des effets spéciaux, on sait faire de l’aréal, du montage, du motion design, on sait aller chercher des équipes différentes d’un projet à l’autre. Du coup ça montre toute une panoplie de compétences qu’on a et qu’on peut mettre à profit des autres qui n’ont pas la vidéo comme spécialité mais plutôt la science ou alors qui savent faire de la vidéo mais à un moment donné il leur faut une plus grosse équipe.

Manon
Ok, trop bien. Donc là, si on repart, mais si on va un petit peu sur la question de comment ça fonctionne financièrement, la question à 3000 euros, comment est-ce qu’on vit d’une chaîne YouTube ? En façade, on pourrait se dire que vous vivez de votre chaîne YouTube, c’est quoi finalement, c’est quoi l’articulation derrière de vos finances ? J’aime pas ce mot. Comment, c’est quoi votre modèle économique ? Exactement, en fait.

Chloé
Alors en fait faut savoir qu’on ne vit pas de YouTube avant… Enfin, quand les gens pensent vivre de YouTube, ils pensent à la monétisation, le nombre d’argent qu’on va générer en faisant des vues sur une vidéo. Ça, il a pas grand monde qui vit de ça, il faut vraiment faire énormément de vues. Je sais même pas à quel nombre de vues le point de bascule se fait et à ce moment-là, on génère vraiment de l’argent. Nous, pour le coup, donc on ne vit pas de la monétisation, on ne vit pas…

Chloé (10:07.982)
On ne vit pas des sponsors, donc des marques qui voudraient qu’on mette en avant leurs produits dans nos vidéos. En tout pas aux DPN, ce genre de choses.

Manon
Ouais, ok. Mais du coup, vous avez quand même un modèle qui est mixte. Vous en avez une part de revenu

Chloé
On a une part de ça, mais ça fait fonctionner la saut, c’est tout, ça paie les logiciels, mais c’est tout, c’est infime. Après on a fait le choix de ne parier là-dessus non plus. Nous, ce qui va nous rémunérer, c’est tous les contrats à côté. Donc plutôt la vidéo qu’on fait pour les institutions, exemple, les projets de production plus créatifs avec d’autres youtubeurs, ou ponctuellement quand on a des projets plus corporates, ça arrive encore de temps en temps. Une entreprise qui veut une vidéo pour son entreprise ou ce genre de chos

Manon
Donc si je résume, vous avez un modèle actuellement où concevoir votre projet créatif, donc la chaîne Superama, est financé par le reste de votre activité. Et en même temps, c’est aussi un miroir, c’est aussi un… On a une vitrine pour venir chercher le reste des activités.

Chloé (11:10.382)
Tout à fait.

Manon
Vous avez une vraie rigueur et un vrai sens du détail dans cette production par rapport à d’autres chaînes YouTube de la même taille si je puis dire, que ce soit dans la direction artistique, dans l’écriture, dans le ton, le décor, rien n’est laissé au hasard, même les goodies, il y a vraiment un jusqu’au boutisme qui assez, qui moi en tout cas m’impressionne. Comment vous faites pour maintenir ce niveau d’exigence là dans un monde, dans un contexte où il faut aller vite, où il faut beaucoup produire, où on est attendu, c’est quoi votre propre choix par rapport à tout ça ?

Chloé (11:45.000)
Alors ça c’est Alex parce que c’est lui le spectre autistique du duo. Moi je suis pas du tout quelqu’un qui est… Et on passe le bonjour à Alex. Non, non, moi je suis pas du tout perfectionniste, j’ai tendance à dire, allez c’est bon, on y va, il faut que ça parte. Lui il est très perfectionniste, il est ultra pointilleux, il va chercher la bonne couleur, il va passer des semaines, des mois sur un logo ou sur le choix d’une couleur ou sur le décor.

Le montage, genre de choses, là où moi je suis beaucoup moins pointilleuse. Je vais faire plus attention au choix des mots ou l’information pure qui va arriver dans la vidéo, mais tout ce qui est rigueur, technique, visuelle, etc., franchement, c’est pas grâce à moi parce que sinon ce serait beaucoup moins bien, super.

Manon (12:35.688)
Et est-ce qu’on peut dire que vous allez plutôt chercher la qualité à la quantité ? J’ai remarqué que vous publiez très peu sur les réseaux sociaux, vous publiez quelques stories, quelques coulisses là où il y a d’autres chaînes qui sont vachement plus dans la quantité. Est-ce que c’est volontaire ? Comment est-ce que vous gérez ça ?

Chloé (12:50.000)
On a essayé de faire un peu de la quantité en termes de vidéos YouTube en se forçant à suivre un calendrier de publication hebdomadaire. Et on s’est rendu compte que c’était trop compliqué avec tous les autres projets moins créatifs et plus professionnels à côté, parce qu’au bout d’un moment, c’est pas YouTube qui nous fait manger directement, faut que les projets rémunérateurs sortent et donc ça laisse un petit peu moins de temps à YouTube.

C’est super compliqué parce qu’après on a nos vies à côté, on a aussi d’autres projets pro de temps en temps, d’émissions à côté. Donc c’était super compliqué de faire du contenu et puis faire du contenu pour du contenu ça nous plaît pas, on préfère prendre le temps d’écrire, de monter et puis étaler nos vies sur les réseaux sociaux c’est absolument pas notre truc. Donc en fait, non, il n’y a pas énormément de stories, il n’y a pas énormément de vidéos en ce moment parce qu’en plus je suis en congé mat donc j’ai vraiment autre chose à penser.

Et du coup, on privilégie la rareté.

Manon (13:50.000)
Il y a quand même une stratégie de rareté, je trouve, sur votre présence en ligne.

Chloé (14:06.734)
C’est pas une stratégie, c’est juste comme ça, on est comme ça. C’est une stratégie, c’est tout à fait pensé. On est un peu les Jean-Jacques Goldman de l’UG.

Manon (14:16.174)
Tu peux faire semblant et dire que c’est une stratégie.

Tu sais, l’air de rien finalement, c’est aussi dire aux auditeurs et aux auditrices qu’on n’a pas besoin de publier tous les jours et que quand on a un concept fort et qu’on est attendu, qu’on arrive à créer une communauté, on peut aussi dire ça. Vous avez une communauté forte qui attend vos vidéos et qu’elles arrivent 15 jours après ou 6 mois après, ils sont encore là.

Chloé (14:40.000)
Oui c’est vrai, mais ça je sais pas si c’est une chance qu’on a parce qu’on a hérité aussi de la communauté de ce vidéaste qui nous a mis en avant et on peut le savoir.

Manon (14:55.000)
Vous avez aussi “own” votre propre chance, je pense que vous l’avez clairement construite.

Chloé
Les communautés de science sont quand même hyper fidèles quand elles s’attachent à un produit peut-être un peu différent. C’est vrai que Superama, on ne fait pas juste de la vulga, on essaie de faire un peu de mise en scène, des effets spéciaux, un peu d’humour, ce genre de choses.

Manon
Je crois que vous avez quand même un produit qui est attachant, qui est unique…

Chloé (15:10.976)
Très clivant à la fois parce que soit on déteste, soit on adore.

Manon
Mais ça, c’est super intéressant comme truc à garder de se dire. Ne cherchez pas à plaire à tout le monde, 100 % pas. Vraiment, il a un ton. Si vous connaissez pas Superama, je vous conseille d’aller voir. Je crois qu’il n’y a pas grand-chose d’autre qui ressemble à ça.

Chloé
Non, faut aimer les blagues de papa, les jeux de mots, l’humour noir, le cynisme et les effets spéciaux à la con. Moi ça me fait marrer. Après, c’est pas du goût de tout le monde.

Manon (15:50.000)
Tiens, viens, on va repartir sur la question de… On dit que vous avez… Vous ne plaisez pas à tout le monde, vous avez votre rigueur créative, vous avez un univers qui est fort. Comment est-ce que vous gardez… Et toi, tu me dis, on fait aussi de l’influence. C’est-à-dire que je traduis : vous mettez à disposition votre image pour l’associer à des marques. C’est ça ? Que ce soit en démarrage de vidéo, mais aussi des vidéos où vous apparaissez dans un contenu de marque ou d’institution ?

Chloé (16:18.710)
Oui, du cross-postage, ce genre de choses.

Manon (16:25.000)
Comment vous gardez, comment vous maintenez votre ligne édito, comment vous gardez votre indépendance créative ?

Chloé (16:30.000)
C’est contractualisé. En gros, quand on va répondre à un appel d’offre par exemple d’une institution qui cherche une chaîne YouTube pour mettre en avant un projet de recherche, là par exemple on travaille avec l’université de Toulouse en ce moment pour faire une vidéo sur la mécanique quantique. Donc c’est un projet en particulier avec une équipe de chercheurs en particulier et eux ils avaient besoin d’une chaîne YouTube pour mettre en avant ça et parler de leurs projets et de leurs facs.

Mais en fait ils savent qu’ils vont travailler avec des youtubeurs, donc ils savent qu’ils n’ont aucun intérêt à brider et à partir sur quelque chose de très cadré, très institutionnel. Alors c’est peut-être pas le cas mais très chiant parce qu’on imagine tout de suite que l’institutionnel c’est un peu chiant. Non, non, les facs là, elles ont compris qu’il fallait s’associer à des gens qui avaient déjà une communauté, qui avaient déjà une notoriété et qui savaient mettre en avant, enfin faire de la com, de la vidéo autour de sujets très pointus quoi.

Manon (17:20.000)
En gros, quand ils viennent vous chercher vous et vous prennent vous dans votre package, quand ils viennent vous chercher en influence, vous avez une manière un peu policée de dire c’est avec notre ton, avec notre humour et avec nos règles ou pas.

Chloé (17:32.654)
Oui, c’est ça, c’est dans le contrat : respect de la direction artistique, de l’humour. Alors on essaye d’être assez clair : attention, il y a de l’humour noir, du cynisme, des blagues à la con, ce genre de choses. On met des liens quand même pour qu’ils aillent voir et qu’ils puissent se préparer. C’est obligé parce que de toute façon, ils n’auraient aucun intérêt à nous choisir et à nous censurer entre guillemets, parce qu’on ne ferait pas de vues, les gens seraient déçus, ils arriveraient sur la vidéo, ils diraient : c’est pas Superama, ça, c’est une vidéo lambda.

Manon (17:59.616)
C’est écrit dans le contrat, c’est incroyable.

Chloé (18:05.000)
Ça aurait aucun sens. Mais on le précise quand même à chaque fois dans les contrats, parce que les contrats passent de main en main et les signataires n’ont pas toujours vu la chaîne au final. Ça nous est arrivé avec un client, ça s’est mal passé parce que c’était bien précisé dans le contrat qu’il fallait le respect de notre ligne éditoriale. C’était pour faire un réel de 1 minute 30 sur le thème de l’eau sur notre Insta.

Et donc on a envoyé un script. La chargée de com, la chargée de projet de cette entreprise était contente. Elle l’a envoyé au directeur, sauf que le directeur était pas du tout au courant de la ligne éditoriale de Superama. Et il s’est retrouvé avec un script où on insultait les gens qui ont une piscine privative chez eux. Sauf que peut-être il avait une piscine privative chez lui, ce monsieur. Il s’est fait insulter, il a pas compris. Il a dit mais c’est quoi ces guignols ? Moi je veux pas travailler avec eux, c’est quoi ça ? Et donc le contrat s’est terminé.

Manon (19:07.950)
Ok, pas super fin d’histoire.

Chloé (19:12.000)
Non, mais comme on a une très bonne juriste avec qui on travaille de temps en temps, on a pu avoir quand même une partie de l’argent.

Manon (19:07.950)
Mais du coup, d’où la nécessité d’avoir un contrat, d’encadrer les choses et aussi de faire attention à… même si ça vous appartient pas, de faire attention au niveau de lecture et au niveau de décision dans l’entreprise avec qui vous travaillez, même si c’est pas de votre côté. Trop bien, hyper intéressant comme truc. Bon, OK, et la suite, Superama demain. Donc là, j’ai entendu… enfin, je le vois, on est face à face.

Chloé
Je grossis, c’est ça ?

Manon
Un peu.

Tu parles, congé mat. C’est quoi la suite demain de Superama ? C’est quoi vos ambitions ? C’est quoi vos projets pour les prochaines années ?

Chloé (19:45.000)
Alors Superama n’a pas l’ambition de devenir une grosse entreprise de prod énorme multinationale, mais quand même on va devenir une entreprise. Normalement ça devrait se faire au mois de janvier, je m’avance alors qu’on n’a rien signé encore et c’est encore en discussion, mais l’idée ce serait de valoriser un peu notre compétence, notre matos, ce genre de choses vraiment bien cadrées.

Et ça nous permettra aussi de nous débloquer certaines portes, parce que par exemple, on ne peut pas produire de documentaires quand on est une association. Je ne sais pas pourquoi, mais…

Manon (20:20.942)
Aujourd’hui, tu l’as dit très rapidement au début, vous êtes une association aujourd’hui pour laquelle vous travaillez toi et Alex en tant que micro-entrepreneurs. Petit aparté pour les auditrices : le fait d’être en association vous ouvre des portes sur certains types de projets et certains types de subventions notamment, mais ça vous en ferme d’autres. Et donc aujourd’hui, vous allez faire le choix de passer en entreprise. Donc vous serez tous les deux gérants.

Chloé (20:45.000)
Oui, c’est ça. Salariés non, mais dirigeants. Ce serait une SRL.

Hello hello, c’est la Manon du montage. J’ai effectivement un peu fourché dans le cadre d’une SARL en les dirigeant non salarié et je devrais le savoir puisque c’est mon statut et on peut également avoir plusieurs gérants et donc on pratique une co-gérence

Manon (20:55.000)
Ok, donc du coup, demain Superama continue avec la même ambition de continuer à accompagner des projets créatifs. Si toi, tu devais tout recommencer demain, est-ce que tu repartirais comme ça ? Est-ce que tu as l’impression que c’était le choix audacieux mais qui a fonctionné par un coup de chance ? Est-ce que tu ferais autrement ?

Chloé (21:10.000)
J’ai réfléchi sur le choix du modèle. On l’a fait un peu à l’arrache parce qu’il nous fallait une structure pour nous encadrer tous les deux en tant que micro-entrepreneurs. C’était un petit peu casse-pied de faire deux factures à chaque fois pour des clients. Donc l’association, c’est un bon compromis, d’autant qu’il nous fallait un RIB pour récupérer le peu de monétisation qu’on récupère sur YouTube, ce genre de choses. Mais c’était peut-être pas la meilleure stratégie pour de la valorisation de compétences à long terme.

Aujourd’hui on est suivis par des juristes, des experts comptables, etc. En même temps, on n’avait pas le pied dedans. Nous, on voulait juste faire des trucs, il nous fallait une structure, on a fait une asso, c’était facile. Puis voilà, comme ça on se lançait. La micro-entreprise, c’est facile à faire aussi. Mais au bout d’un moment, ça a ses limites. Et puis il y a plein de changements à partir de l’année prochaine pour le statut de micro-entrepreneur. Donc du coup, là c’est bien de se faire accompagner et de changer.

Manon (22:12.270)
C’est très bien parce qu’en fait, je vais pas dire que tu n’as pas répondu à ma question parce que si, tu as répondu à la question que j’ai posée, mais moi je l’avais pas posée pour que tu me parles de ça. Mais j’adore la réponse. Moi, ma question, ce que je voulais demander dans le fond, c’était : vous avez lancé Superama en mode “viens, vas-y, on fait des trucs”. Et vous êtes parties un peu bille en tête en disant : “viens, on y va avec les guts de se dire, on fait des trucs de pros, même si on n’a jamais fait des trucs de pros pro.”

Chloé (22:35.000)
On avait déjà un peu fait parce qu’Alex bossait déjà avec une boîte de prod, mais il a fallu qu’on achète la caméra, il a fallu fabriquer le décor, il a fallu commencer à faire du script pour YouTube, moi j’avais jamais fait. Donc ouais, on a joué le jeu des pros dès le début. Moi j’ai pas du tout le syndrome de l’imposteur, j’ai même parfois un peu trop confiance en moi. Là où Alex est un peu l’inverse, il me rabaisse — pas dans le sens négatif, mais il me ralentit.

Manon (23:00.000)
Il te rattrape avec une petite ficelle en mode, tu t’envoles là. Donc c’était un peu du “fake it until you make it”, comme on dit.

Chloé (23:15.000)
Ouais c’est ça ! Ça a marché ! Et on a un peu provoqué la chance parce que quand je disais qu’il y avait ce gros youtubeur là qui nous avait mis en avant, en gros pour le nommer c’est Arnaud Thiry qui a la chaîne Astronogeek. À l’époque, il faisait de l’ouverture de courriers en live sur Twitch, donc on lui a envoyé un courrier avec un script. Mais c’est un script qui décrivait notre chaîne : en gros, on a mis en scène nos personnages pour expliquer qui on était, on a envoyé un lien vers une vidéo.

Et il l’a passé en direct sur Twitch et après il nous a dit : “mais les gars c’est trop bien ce que vous faites, venez on fait une collab trop cool.”

Manon (23:53.014)
Et j’adore le fait que tu dises que vous avez provoqué la chance, parce que ça se provoque la chance, c’est trop bien !

Chloé (24:05.000)
Et du coup on a fait une collab quelques mois après et il a publié un teaser de cette collab. La collab est sur notre chaîne. Donc la collab c’est quand on fait une vidéo avec une autre chaîne YouTube. Donc la collab est sur notre chaîne, le teaser a été publié sur sa chaîne principale qui avait à l’époque 700 000 ou 800 000 abonnés. Et là on a récupéré 20 000 abonnés en quelques jours.

Manon (24:35.000)
Les gens ont vu le teaser sur sa chaîne, ils sont venus chez vous, ils se sont abonnés au passage, ils ont adoré et ils sont restés. Tout à fait. Bravo d’avoir provoqué ça. Je connaissais pas cette anecdote, elle est canon. Quel conseil tu aurais aimé entendre quand vous vous êtes lancés au tout démarrage ? Est-ce qu’il y a quelque chose que tu as appris sur la route et que tu aurais bien aimé savoir et que tu aimerais bien dire à une auditrice qui hésite à lancer son projet un peu ambitieux ?

Chloé (25:08.150)
Pas trop se prendre la tête avec l’algorithme. Parce qu’en fait il change tout le temps, il est volontairement obscur. Donc si tu commences à essayer de le comprendre avant de te dire “j’y vais”, il aura déjà changé. Il y aura déjà des nouvelles choses à faire. Non, faut vraiment… Et il faut pas avoir l’impression de faire de l’ultra professionnel pour que ça fonctionne.

Il n’y a pas besoin d’avoir une prod de ouf pour se lancer, franchement ça sert à rien. Les gens veulent de l’authenticité et un truc un peu original qui change. Donc même si c’est fait à l’arrache dans ton garage avec un micro pourri, du moment que ce que tu racontes est intéressant, ou que ce que tu montres a du sens, il n’y a pas de raison que ça ne fonctionne pas.

Bon après, il faut trouver son public, ça c’est un peu plus difficile de sortir des méandres des réseaux sociaux quand t’es tout petit. Mais il ne faut pas hésiter à se rapprocher de plus grosses productions… enfin, d’autres créateurs un peu comme toi mais un peu plus influents.

S’entourer de créateurs qui sont à peu près à ton niveau, donc accessibles, ou un peu au-dessus, pour monter des étages petit à petit, leur demander des recommandations, ce genre de choses. C’est un cercle vertueux, pas vicieux. Après, nous, on a un entourage de copains très proche maintenant sur YouTube, sur les réseaux sociaux, et on monte ensemble et on travaille ensemble. Du coup ça aide tout le monde. C’est ça, s’entourer et monter ensemble.

Manon (25:58.158)
Heu… Vertueux ?

Chloé (26:15.832)
Bien s’entourer, et pas attendre d’avoir du matos de fou, des centaines de milliers d’euros pour produire des trucs, non, ça sert à rien.

Manon (26:30.000)
Ok, genre tu veux faire un film, une caméra et tu tournes quoi.

Chloé (26:40.000)
Ouais c’est ça. J’ai plus la phrase exacte mais c’est un peu ça. Mais c’est un peu le Flotcast aussi, le podcast de Florent Bernard et Adrien Ménielle qui s’est arrêté. Mais eux, pareil, ils ont toujours revendiqué faire un podcast… à l’arrache je sais pas, mais ils avaient juste deux micros dans un salon et puis ils recevaient des gens. Et puis c’est le côté fait maison qui plaît et qui fait rester les gens, parce que c’est un peu différent et parce que c’est très authentique.

Manon (27:00.000)
Ok, on garde ça. Merci beaucoup Chloé d’être venue au micro, si près d’accoucher.

Chloé (27:03.448)
Ouais, dans 3 semaines. Enfin j’espère avant, j’en ai marre.

Manon (27:15.000)
Superama, c’est la preuve qu’on peut apprendre en faisant et c’est un modèle économique hybride qui leur permet de vivre correctement sans sacrifier leur liberté et ce plaisir de créer leur propre projet. Tu peux retrouver tous les accès vers Superama, la chaîne et l’agence de production, dans les notes de l’épisode, sur ton appli de podcast préférée ou sur mon site internet manonverbeke.com/04.

Si tu as aimé la conversation, parle-en autour de toi sur LinkedIn, en story sur Insta ou dans ton groupe de freelance. Tag nous : @superama.production et @manon.verbeke.design, ça nous fera plaisir de voir ce que tu as retenu de l’épisode.

Et si tu veux me faire le meilleur des cadeaux, prends deux minutes maintenant, maintenant pour t’abonner et laisser cinq étoiles. Oui, maintenant, maintenant, sinon tu vas oublier. C’est tout bête, mais ça change vraiment la portée du podcast. Et puis ça me fait plaisir, tout simplement. Merci d’avoir été là et à très vite dans un épisode de Celles qui créent.


Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.

Manon Verbeke

Designer, mentor & formatrice

Moi c’est Manon, designer graphique, mentor business, et créatrice du podcast Celles qui créent.

Ce podcast, c’est exactement ce dont j’aurais eu besoin au début : un endroit pour m’aider à avancer dans mon propre business, tout en m’inspirant des parcours variés d’entrepreneures créatives qui ont créé l’entreprise qui leur va comme un gant, comme moi, comme toi !

J’ai créé ce podcast pour toi si tu es illustratrice, designer, communicante, conceptrice de jeux vidéo, webdesigneuse, archi d’intérieur…
et que tu veux construire un business qui te ressemble, sans t’épuiser.